Diagnostic : « Un miroir non déformant de notre culture d’entreprise »
Témoignage Diagnostic Olivier Terral (Enedis)
Témoignage d’Olivier Terral, directeur prévention santé sécurité d’Enedis.
Dans quel contexte Enedis a-t-il lancé la réalisation d’un diagnostic culture de sécurité avec l’Icsi ?
Olivier Terral : Ces dernières années, Enedis avait été confronté à plusieurs accidents graves, en lien direct avec le risque central de notre activité, qui est le risque électrique. Ces événements ont profondément marqué l’entreprise et créé un traumatisme collectif. Notre présidente et le comité exécutif ont estimé que le moment était venu de mener un travail d’introspection et d’engager un plan de transformation en profondeur. Il s’agissait de prendre du recul, avec la volonté affichée de se remettre en question collectivement sur notre culture de sécurité. Pour réaliser ce diagnostic de notre culture de sécurité, notre choix s’est porté sur l’Icsi, en raison de sa très forte légitimité et de sa couverture paritaire qui englobe des entreprises, des collectivités, des organisations syndicales et le monde académique, et aussi parce que l’association s’inscrit d’abord dans une démarche de transmission pour accompagner la progression de membres adhérents.
Comment le diagnostic s’est-il déroulé ?
Olivier Terral : Nous avons lancé la démarche à l’été 2024, par une consultation interne sous la forme d’un questionnaire adressé à l’ensemble des 40 000 salariés d’Enedis. Elle a suscité une véritable adhésion, avec 75 % de réponses, soutenue par l’engagement personnel de la présidente et de l’ensemble de la ligne managériale.
Dans un second temps, l’Icsi a procédé à des observations de terrain et a mené des interviews en groupe au sein de trois directions régionales (rurale, urbaine et intermédiaire) en considérant qu’elles étaient représentatives des configurations de nos territoires et de nos contextes opérationnels.
Cette méthodologie structurée a fait émerger une réalité de terrain, celle d’une tendance au fatalisme vis-à-vis du risque d’accident, partagée à tous les échelons hiérarchiques de l’entreprise. Ce terrain d’expérimentation a permis de confirmer l’homogénéité de notre culture de sécurité sur nos territoires et entre les différents métiers.
Quels enseignements tirez-vous de cette démarche ?
Olivier Terral : Le diagnostic a été un révélateur puissant. Ce trait culturel de fatalisme est lié aux spécificités de notre activité sur le réseau électrique et à un sentiment partagé qu’il faut intervenir en urgence et par tous les temps, avec les aléas que cela comporte. Nous devons travailler dessus pour agir davantage en prévention et empêcher l’accident. A partir de ce point de départ, nous avons identifié trois axes autour desquels construire notre programme de transformation. Nous devons d'abord renforcer notre culture de prévention par rapport à une culture actuelle trop focalisée sur la protection. Il faut ensuite renforcer notre leadership en sécurité pour faire davantage confiance aux opérateurs sur la mise en place de bonnes postures et pratiques en matière de prévention des risques. Enfin le troisième axe concerne la nécessité de développer la transparence et la culture apprenante de notre organisation. Ces enseignements ont été restitués lors de séminaires, d’abord auprès du comité exécutif, puis auprès des directeurs régionaux et de leurs équipes. Ce processus permet une appropriation large et un début de co-construction de notre transformation.
Où en est Enedis aujourd’hui ?
Olivier Terral : Nous travaillons désormais avec l’Icsi sur la phase de co-construction pour que chaque individu et chaque collectif de travail puisse s’approprier ce diagnostic et en tirer des changements concrets dans son quotidien. L’association nous accompagne dans la création d’un kit destiné aux managers, et dans l’exploitation des retours terrain pour structurer les actions à venir.
Ce diagnostic nous a tendu un miroir exigeant mais juste, sans concession, fidèle à la réalité du terrain. C’était l’objectif asséné au départ. À nous désormais de transformer cette prise de conscience en un changement durable, à la hauteur des enjeux révélés.
